Commence alors pour eux un parcours semé d’embûches entre les secrétariats les informant que les médecins ne prennent plus de nouveaux patients, ou les confrères qui affichent eux-mêmes le même message, soit dans leur salle d’attente, soit sur leur site internet. Tout ceci crée un véritable état de stress chez ces personnes qui ont aussi des enfants en bas âge et s’inquiètent donc de ne pouvoir avoir recours à un médecin en cas de besoin.
S’il est fort compréhensible que des confrères ne souhaitent pas devenir « médecin traitant » pour ne pas avoir à gérer la paperasserie inévitable imposée par les Caisses, j’avoue avoir du mal à me satisfaire du refus de soins.
Si l’article 47 du code de déontologie médicale énonce que le médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, il n’empêche que le serment d’Hippocrate, que je placerais largement au-dessus en valeur absolue, rappelle que le médecin doit donner ses soins à l’indigent et à quiconque lui demandera.
Qui donc peut soigner si ce n’est un médecin et en qui mettre sa confiance ? Qui d’entre nous n’a jamais eu besoin d’un confrère pour le rassurer ou lui donner un avis éclairé ?
Les médecins se plaignent régulièrement de l’apparition d’une médecine en dégradé où l’on demande à des paramédicaux de réaliser des actes de soins.
Sachons alors tenir notre place dans le système de soins et accepter de recevoir en consultation les patients qui en font la demande, quitte à gérer une certaine attente. C’est bien ce qui se passe dans le système hospitalier où nous assistons aujourd’hui à des attentes de plus en plus longues pour avoir accès à des consultations programmées.
Il nous est « proposé » d’adresser par fax notre demande de consultation argumentée afin que les patients soient convoqués. Si ce système paraît assez peu adapté à la médecine générale, on peut comprendre aisément que des renouvellements d’ordonnance ou du suivi de maladies chroniques puissent être décalés dans le temps en gardant des plages d’urgence pour assurer un minimum de couverture de soins aux patients demandeurs.
Évidemment ceci est plus facile à réaliser dans un cabinet médical de plusieurs confrères que pour ceux qui exercent en solitaire, que ce soit en milieu urbain ou rural. Sans compter qu’il n’est pas raisonnable non plus d’adresser dans les services d’urgences des patients pouvant fort bien être pris en charge en « ville ». Il me paraît opportun que nous raisonnions en temps de présence au cabinet afin de ne pas sombrer dans le burn out ou le surmenage.
Le Conseil départemental compte vraiment sur la bonne volonté de tous les confrères de Loire-Atlantique pour faire leur possible afin de permettre à chacun de bénéficier d’un accès aux soins dans un temps raisonnable.
Le projet de loi santé élaboré au printemps et voté à l’assemblée nationale a cristallisé un mécontentement général des professionnels de santé (C’est un euphémisme !...).
N’écoutant personne, le gouvernement et sa Ministre de la Santé ont décidé de passer outre l’avis de la profession entière en imposant leur vision de l’avenir médical.
Le Premier Ministre, conscient des échéances électorales, a alors décidé de lancer une concertation bien tardive pour recueillir l’avis à posteriori des professionnels. Il sera l’hôte du prochain congrès de l’Ordre des médecins et si il se comporte comme le Président de la République, l’an passé, il n’y a pas grand-chose de bon à en attendre. En clair, je vous ai écouté et voilà comment vous ferez !
Toutefois, l’optimisme de notre profession étant la règle, le Conseil national a décidé de lancer une grande concertation nationale auprès des patients et des médecins pour élaborer une nouvelle plate-forme de propositions destinées à préparer notre futur.
Cette grande conférence de la santé aura lieu en janvier prochain durant 2 journées (!), elle va nécessiter une réflexion générale de tous.
Le Conseil national met en place des réunions régionales de proximité, un sondage grand public et une série de consultations au siège du Conseil national dirigées vers les acteurs du monde de la santé. Un questionnaire national, ouvert à tous les médecins,
a été mis en place sur le site «lagrandeconsultation.medecin.fr».
L’espoir est de pouvoir offrir aux futurs candidats à la présidence de la république de 2017 un canevas sur l’avenir de notre profession.
Nous comptons sur tous les confrères pour participer activement à ce recueil de doléances mais surtout imaginer des propositions novatrices. Les points de réflexions iront depuis les formations médicales, les contenus des métiers et les délégations de tâches, les parcours professionnels, les rémunérations, etc…
Il ne faut, à mon avis, rien s’interdire et envisager une très, très large plate-forme.
Il serait un peu facile et désolant que l’on nous cantonne dans ce que quelques chefs de cabinets de ministères veulent. C’est à dire le tiers payant généralisé obligatoire, l’accès aux soins pour tout et tous, n’importe quand, n’importe comment, la suppression du secteur 2, un hôpital réduit à sa portion congrue où les financiers ont pris le pas sur les médecins, etc… Ne nous laissons pas manipuler et montrons que nous pouvons être force de propositions.
Tous les confrères attendent du Conseil national, c’est à dire des médecins, des propositions « chocs » et certainement pas un « consensus mou ».
On peut toujours rêver…
Docteur Jean-Louis CLOUET
jean-louis.clouet@medical44.apicrypt.org
Article 47
(article R.4127-47 du Code de la Santé Publique)
« Quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux malades doit être assurée. Hors le cas d’urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d’humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles.
S’il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins. »
Serment d’Hippocrate :
« Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire. »